Il est des lectures, importantes, qui vous forgent une opinion, et pour longtemps. L'Antimanuel d'économie, de Bernard Maris, est de celles-là. Un livre qui démontre et démonte tout un tas de concepts qu'on rencontre dans l'économie, celle dont on nous parle tous les jours à la radio et la télé.
On y apprend entre autres, avec plus ou moins de surprise :

que la "science" économique n'a de science que le nom que ses partisans lui donnent, ses fondements mathématiques étant à la merci du moindre coup de vent rationnel.

que le jargon mathématicien qui y est employé, outre pour donner l'air sérieux, est surtout pratique pour éloigner les béotiens, sur l'air de "c'est bien trop compliqué pour vous, faut laisser ça aux spécialistes mon bon monsieur".

que la concurrence est purement et simplement inefficace.

que le marché aboutit bien souvent à un équilibre "bas" où tout le monde est peu gagnant (tandis que la coopération altruiste amène un équilibre "haut").

que d'aller pas à pas vers la concurrence "totale" ne fait que dégrader la situation à chaque étape.

que la bourse n'est que l'art de jouer aux moutons de Panurge.

que tout bien pesé, dès que ses intérêts sont en jeu, l'homme n'est absolument pas rationnel et devient donc imprévisible.

que finalement, le don, la gratuité, la solidarité sont bien plus efficaces pour le bonheur du plus grand nombre.

Evidemment, ce n'est pas un livre qui se lit aussi aisément qu'un roman, un minimum de concentration est nécessaire. Encore que Bernard Maris facilite les choses par une écriture légère et humoristique, toujours illustrée. Quoi qu'il en soit, c'est une lecture indispensable pour qui veut comprendre et décrypter les discours des grands capitaines de l'économie, voire tenter de la remettre à l'arrière-plan qu'elle n'aurait jamais dû quitter. Je recommande donc sans réserve.

Flânons donc.